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La gestion de projet, mythe et réalité

La gestion de projet, mythe et réalité

Catégorie : dossier 
Auteur(s) : Laurent ROCHER
Date : dimanche 10 avril 2022
Durée de lecture < 6 minutes

La gestion de projet permet de mobiliser les ressources immatérielles de l’entreprise. Mais plusieurs dangers peuvent venir entraver cette démarche. Le point avec Laurent Rocher, conseiller en stratégie d’entreprise.

 

« Gestion » et « Projet », Voilà deux mots qui sont probablement parmi les plus utilisés dans le vocabulaire de l’entreprise. Et les fonctions projet – chef de projet, responsable projet, directeur projet, project manager – parmi les plus répandues. On trouve même dans ce domaine des responsables projet junior – un quasi-oxymore qui devrait nous alerter. On verra plus loin pourquoi.

La littérature, enfin, abonde sur ce sujet, et a d’ailleurs largement débordé du cadre de l’entreprise : ne parle-t-on pas de projets sportifs, éducatifs, personnels, politiques… Tout est projet.

 

Une pièce maintes fois jouée, par des acteurs a priori compétents. Et pourtant, des PME aux grands groupes, en passant par les administrations publiques, nombreux sont les exemples de dérives, voire d’échecs, de projets : délais à rallonge, budgets dépassés, produits ou services ne correspondant pas aux attentes… Vous avez probablement au moins un exemple qui vous vient à l’esprit.

Voilà pour le tableau, le constat. Mais que faire pour éviter ces déconvenues ? S’il n’existe pas de méthode infaillible en matière de gestion de projet, nous pouvons au moins passer en revue les pièges majeurs à éviter. De ce retour d’expérience, nous pourrons ainsi dessiner les bonnes pratiques d’une gestion de projet efficace et propre à atteindre les objectifs fixés.

 

Les quatre grands pièges à éviter dans la gestion de projet

 

Le piège « de l’outil providentiel de gestion de projet »

Très courant, surtout pour les chefs de projet junior. C’est le piège de la micro-gestion, que favorisent les éditeurs d’outils de gestion de projet : « Il vous suffit de structurer le projet dans ses moindres tâches, ses moindres liens logiques entre tâches, et l’outil fera le reste : mise à jour, suivi, alertes… » Malheureusement, dans la réalité, l’outil peut vite devenir chronophage et l’essentiel, nous le verrons plus loin, est ailleurs.

Question outil de gestion de projet, les outils disposent plus ou moins tous des mêmes fonctionnalités, et sont d’une complexité d’utilisation variable. Certes, votre choix devra intégrer des fonctionnalités incontournables – structuration des tâches, liens logiques, visualisation des marges, du chemin critique, affectation des ressources et évaluation du plan de charge – mais une fois le choix fait, il faut en maîtriser l’utilisation, qui peut vite tourner. Privilégiez alors la simplicité de codification et de mise à jour. En matière d’outil et de structuration des tâches, le plus est l’ennemi du bien.

N’oubliez pas ce que vous attendez de l’outil : fournir rapidement un état synthétique du projet en termes de délais, de ressources, de coûts, afin de communiquer avec les équipes et piloter le projet.

 

Le piège « de l’objectif flou et/ou mouvant »

Cette situation, malheureusement presque systématique, pose le problème du cahier des charges et de la contractualisation du projet. On passe généralement trop peu de temps à définir la fiche projet. Et pourtant, elle contient tout ce qui va conditionner le succès – ou l’échec – du projet : le contexte (pourquoi on fait le projet ?), les objectifs (ce que l’on veut obtenir à la fin), le périmètre (les limites du projet), les ressources nécessaires (humaines, matérielles), ainsi que les grandes phases et jalons du projet. C’est une phase contractuelle importante entre le sponsor, le client, et celui qui va conduire le projet. De ce point de vue, en France, nous avons encore beaucoup à apprendre de la culture anglo-saxonne – et plus particulièrement américaine, ou l’on passe plus de temps sur cette phase préparatoire, pour ensuite avoir moins de surprises et de remises en cause durant la phase de réalisation.

N’hésitez pas à soigner la charte projet avec le sponsor, le client, et votre équipe. C’est un document vivant, mis à jour, communiqué et validé à chaque modification du contenu, par les parties prenantes.

 

Le piège des « ressources fantômes »

La question des ressources est la préoccupation constante du responsable de projet. Et ce, à plusieurs titres. La gestion de projet est une activité – par essence même – transversale au sein de l’entreprise. Et le responsable projet n’a généralement pas, lui-même, de responsabilité directe - hiérarchique notamment - sur les ressources humaines qui sont allouées à « son » projet. Du moins dans les organisations dites « verticales », qui constituent encore la majorité des cas.

Combien de ressources et quelles compétences ?

Pour quand et quelle durée ?

Et l’on constate ainsi souvent un écart entre les ressources théoriquement allouées au projet et la réalité quotidienne de son déroulement. Les ressources réelles, effectives, « s’évanouissent », disparaissent du projet, dans une sorte de « bonneteau organisationnel » : affectations sur d’autres activités en parallèle, priorités revues à la baisse.

Et quand les ressources sont finalement stabilisées, encore faut-il s’assurer de leur niveau de compétences, d’implication, de motivation. Toutes choses qui vont conditionner leurs performances sur le projet.

S’il n’y a pas de recettes magiques pour éviter cet écueil, on peut tout de même appuyer sur le rôle clé du sponsor et les qualités de leader du responsable projet. Car ils pourront aider à sécuriser quelque peu les ressources sur le projet. Le sponsor, en effet, joue un rôle prépondérant. Il est le commanditaire du projet. Dans une PME, c’est aussi généralement le Directeur de l’entreprise. Il se doit d’apporter son soutien au chef de projet, de clarifier les priorités, d’arbitrer les conflits entre services... Et le chef de projet doit, de son côté, faire preuve d’un solide leadership pour fédérer des ressources autour d’un projet commun, les motiver.

Pour conclure sur ce point. Une ressource projet ne devrait pas travailler sur plus de trois activités en parallèle, projet compris. Au-delà, il est fortement probable que son efficience sur le projet s’effondre.

 

Le piège du « pilotage automatique »

Disons-le tout de suite : en matière de gouvernance de projet, il n’y a pas de pilotage automatique. Et la conduite de projet s’apparente plus à une expérience de rafting sur le Gave de Pau, qu’à la descente d’un long fleuve tranquille.

Même si c’est un piège aujourd’hui moins fréquent, il demeure toujours ce risque de considérer qu’un suivi hebdomadaire avec l’équipe, et qu’une mise à jour mensuelle du projet, suffiront … Ce serait là une erreur fatale.

Gérer, piloter un projet, c’est bien entendu en suivre la progression – qualité, coûts, délais – au travers d’un tableau de bord ad hoc. Mais c’est aussi – et surtout – anticiper les changements, gérer les risques, corriger les dérives. Les outils de gestion du changement et des risques sont des aides précieuses à utiliser en continu.

Enfin, piloter, c’est … communiquer, communiquer encore et encore : avec les équipes, avec le sponsor, avec le client. Tous les acteurs doivent avoir le même niveau de compréhension de l’état du projet, à tout moment.

Pour une communication qui marque les esprits, on utilise souvent la « météo projet », un indicateur visuel très explicite : soleil (le projet est sur les rails), nuages (des points à surveiller), orages (des actions correctives s’imposent de toute urgence).

Pour conclure, la tâche du responsable projet est tout aussi délicate que passionnante. Et son succès dépend finalement de sa capacité à mobiliser, voire à contribuer et à développer, les ressources immatérielles de l’entreprise, qu’elles soient humaines ou organisationnelles.

Laurent ROCHER

+33 (0)6 89 99 49 92

laurent@rocherconseil.fr

Laurent ROCHER
Rocher Conseil