
Nathalie MOTA
Dirigeant associé DC PILOT Pyrénées
& Coach professionnelle certifiée Coach&Team®
Le changement dans l’entreprise au travers des émotions
Les émotions… une notion qui peut sembler simple et qui pourtant se révèle d’une grande complexité tant dans notre vie personnelle que professionnelle. Nos émotions nous habitent, conditionnent notre relation en tout premier lieu à nous-mêmes et bien évidemment aux autres. Les émotions sont la vie, un trésor pour chacun de nous… et pourtant, combien souhaitent les maîtriser ou encore les enfouir voire les annihiler notamment dans un cadre professionnel.
En effet, la culture de l’entreprise par héritage laisse peu de place aux émotions ; chaque individu est là pour accomplir une tâche rationnelle, participer à un travail collectif dans un but de productivité et d’efficacité et non pour faire état de ses émotions ou exprimer ses ressentis. Cependant, on assiste aujourd’hui à une prise de conscience de l’importance du bien-être dans l’entreprise, source indéniable de motivation et d’engagement. Les entreprises s’engagent dans des politiques QVT (Qualité de vie au travail), les nouvelles générations font passer leur épanouissement personnel avant même la source de revenu. Alors face à ses ambiguïtés, quelle place pour les émotions dans le monde de l’entreprise ?

De nombreux auteurs ont mis en avant l’importance de l’intelligence émotionnelle et j’en réfère aux travaux du psychologue américain, Daniel Goleman, qui démontre dans son livre « L’intelligence émotionnelle » que la réussite professionnelle dépend moins du quotient intellectuel ou des diplômes que du savoir-faire émotionnel de chacun. C’est là une garantie de capacités d’adaptation, de maintien de la relation même en situation difficile, de création de synergie dans les équipes… compétences essentielles aux managers.
Cette intelligence émotionnelle présuppose une bonne connaissance de soi et de ses propres émotions. Ainsi est-il intéressant pour les managers, mais également pour nous tous, de connaître les déclencheurs de nos émotions.
Une émotion est une réaction physiologique ; elle ne dure que 3 à 4 minutes maximum et permet au corps de répondre de façon adaptée à un stimulus de l’environnement : le corps se met en tension, se mobilise énergétiquement pour agir. L’émotion a donc en premier lieu une fonction bio-régulatrice. Les émotions sont ainsi à différencier des sentiments, qui quant à eux, sont une construction mentale. Il s’agit alors d’un état affectif d’ordre psychologique, même si un sentiment peut être le prolongement d’une émotion (par exemple : l’angoisse par rapport à la peur, la déception par rapport à la tristesse…). Un sentiment peut persister en dehors de tout stimulus extérieur et pourrait perdurer des années s’il est entretenu.
Partant de ce postulat, nos émotions ne sont par conséquence ni bonnes ni mauvaises, mais sont de précieux indicateurs pour celui qui s’efforce de les écouter. Les affects sont nécessaires car ils servent à nous préparer à l’action. Si l’on prend en exemple la peur, elle nous permet de fuir ou de nous cacher face à un danger par une activation d’un ensemble de systèmes comportementaux innés et adaptés à notre vécu émotionnel. La colère quant à elle est induite par des manquements aux règles ou valeurs fondamentales ou encore par le sentiment d’être traité de façon injuste. Nos émotions sont donc en lien très étroit avec nos besoins, nos attentes et objectifs personnels et, la satisfaction ou non satisfaction de ces besoins entraîne un affect plus ou moins fort selon les situations.
Savoir accueillir sa propre émotion ou celle de l’autres, c’est donc tenter de comprendre le besoin à l’origine de l’émotion. Il est intéressant d’analyser la situation de ce point de vue : quel a été l’élément déclencheur de cette réaction ? quel est le besoin non satisfait ?
L’entreprise n’est bien sûr pas un lieu thérapeutique mais accueillir les émotions (les siennes et celles des autres), comprendre le besoin non exprimé verbalement et en discuter simplement permet de désamorcer nombre de situations tendues. Il s’agit pour le manager d’être en capacité d’établir des relations satisfaisantes pour toutes les parties en reconnaissant l’émotion ressentie et ce qui l’a déclenchée, en expliquant et donnant du sens pour permettre une prise de recul nécessaire à l’ensemble des acteurs.
Par exemple, dans le cas d’une situation stressante pour un individu ou un groupe, une crise économique ou encore une phase de réorganisation, le sentiment de peur est très souvent présent et très rarement exprimé dans l’entreprise. Il peut dégénérer si non traité en angoisse ou encore colère et être à l’origine d’un important désengagement ou encore d’un climat social pesant avec de fortes rumeurs ou encore des actions de sabotage. L’appréhension de cette émotion de peur au plus tôt par le manager lui permettra de créer du lien avec son équipe, d’accueillir le sentiment et d’accompagner l’équipe qui ainsi entendue aura la capacité à retrouver la confiance dans la relation.
L’environnement de l’entreprise aujourd’hui est complexe et le changement devient la norme. La confrontation et la nécessaire adaptation à ces changements perpétuels nécessitent de la part des dirigeants et managers une prise en compte de plus en plus professionnelle des émotions dans leur structure.

Courbe de deuil d’Elisabeth Kübler-Ross appliquée à l’entreprise.